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Interview Kevin Bordet – Ses premiers mois aux USA

Au moins de septembre, Kevin Bordet partait pour une nouvelle aventure, celle de devenir assistant coach aux Etats-Unis durant une année. Arrivé au Costal Bend College depuis cinq mois, l’ancien coach de Chandieu nous fait part de ses premières expériences au sein de cette équipe féminine universitaire.

– Pouvez-vous nous rappeler votre rôle au sein de l’équipe ?

Je suis assistant coach dans une équipe universitaire américaine dans le Texas. Aux États-Unis, il y a plusieurs statut pour les assistants coachs. Personnellement, je suis qualifié de « student assistant », en raison de mon visa étudiant. Je suis donc étudiant dans l’université. J’ai des cours d’anglais, de communication, de kinésiologie en plus de mon rôle d’assistant coach. Au sein de l’équipe, je m’occupe des séances de travail individuel lors des entraînements. Durant les entraînements collectifs, j’aide les coachs principaux à organiser l’entraînement. Enfin, lors des matchs, j’ai pour rôle de prendre les statistiques, aider à analyser ce qui fonctionne ou pas sur le terrain, mais aussi à observer, lors de séances vidéos, les forces de l’équipe adverse.

Votre emploi du temps semble être bien chargé entre votre vie étudiante et celle d’assistant coach ?

Durant la pré-saison (septembre-octobre), mon emploi du temps était chargé. Par exemple, ma journée type au cours de cette période commençait par un footing de sept heure à sept heure et demi avec l’équipe. Puis, je m’occupait de l’entraînement individuel avec certaines joueuses de huit heures à dix heures. Jusqu’à quatorze heures, nous sommes tous en cours pour être libre le reste de la journée. Puis, durant une heure, il y avait séance de musculation avant d’enchaîner avec le « study all », une heure de cours consacrée à de l’aide aux devoirs avec les joueuses. Enfin, on terminait avec un entraînement collectif de 16 heures à 18 heures.

A partir de novembre, les séances de musculation et de préparation physiques ont été supprimé.

– Comment vous-êtes adaptez à cette nouvelle vie en tant qu’étudiant ?

Pour avoir l’expérience en tant qu’assistant coach, j’ai du repartir en première année universitaire malgré mon obtention d’un master en France. J’ai donc pris le minimum de cours me permettant de garantir mon visa étudiant. Concernant mon expérience en tant qu’étudiant, les débuts ont été difficile, notamment en raison de la barrière de la langue. Lors des premières jours, je n’arrivais pas tout le temps à comprendre ou m’exprimer en anglais. Par exemple, durant les entraînements, j’étais beaucoup plus dans la démonstration des exercices. Mais avec le temps, je me suis habitué à interagir en anglais. A présent, je n’ai plus de soucis, ni d’appréhension par rapport à la langue car je suis constamment dans un environnement où l’anglais est présent.

Les cours m’ont aussi aidé à progresser en anglais, ainsi que mes enseignants. Ils m’ont accompagné durant ces premiers mois. Ils veillent à ce que chacun ait compris les consignes, comme ça a été le cas avec mes coachs.

Pour l’anecdote, lors de mon arrivée à l’aéroport, c’est un texan qui m’a reçu. Son accent était bien marqué. Je n’arrivais pas à comprendre ce qu’il me disait (rire).

– Comment s’est déroulé votre intégration au sein de l’équipe ?

Les deux premières semaines ont été particulière car mes deux coachs ont contracté la COVID. J’ai donc passé la plupart de mon temps dans ma chambre. Cette période m’a tout de même permis de rencontrer les joueuses, d’échanger avec elles, et de leur expliquer mon rôle au sein de l’équipe. Mon intégration a aussi été facilité par la présence d’une française au sein de l’effectif, qui est passé par le même organisme que moi, European Gladiator, pour venir aux États-Unis.

– Quels souvenirs conservez-vous de vos premiers entraînements individuels ?

Ce n’était pas facile dans les débuts en raison du manque de motivation pour certaines de s’entraîner à huit heures du matin, mais aussi de mes difficultés à m’exprimer correctement.

Elles m’ont ainsi testé lors des premiers entraînements en me posant des questions sur la pertinence ou l’intérêt de tel ou tel exercice. Ce n’était pas toujours simple de répondre avec la barrière linguistique. Cependant, j’ai plus d’aisance aujourd’hui. Ce problème est donc derrière moi. Depuis, nous avons trouvés notre rythme et tout se passe très bien.

Il est vrai que ce n’est pas facile de coacher quand on ne connais pas la langue. De plus, j’ai une vision du coaching différente que celle appliquée aux États-Unis. Je coach beaucoup avec les émotions, avec ce que les joueuses pensent. Sauf qu’avec l’anglais, il est plus difficile pour moi de comprendre comment les joueuses fonctionnent.

Avez-vous remarqué une différence de coaching avec les filles ?

Selon moi, les filles, une fois qu’elles sont motivées et engagées dans l’exercice, elles vont chercher à réussir à tout prix. A partir du moment où elles comprennent pourquoi elles réalisent cette exercice, les joueuses vont persévérer pour réussir. Elles ont besoin de comprendre les raisons et les bénéfices des entraînements que je leur propose. Si je compare avec les garçons américains, ils vont avoir tendance à réaliser ces exercices sans se poser de questions. Sur ce point, ils ont une mentalité que je qualifie de militaire.

– Vous avez coaché en France pendant de nombreuses années. Lors de votre arrivée aux États-Unis, est ce que cette expérience vous a été utile ou, en raison du style de basket différent, vous avez eu l’impression de repartir à zéro ?

Je pense repartir de zéro, car on pratique le même sport, mais il y a des attentes complètements différentes sur plusieurs aspects. L’approche du basket en général est totalement nouvelle. Le but de cet voyage est de joindre mon expérience de coach en France avec celle au Texas afin de créer ma propre vision du coaching et du basket.

– A ce sujet, quelles sont les différences que vous avez pu observer entre le basket américain et français ?

Il y a déjà beaucoup plus d’entraînements aux États-Unis. Au sujet du jeu, le basket américain est d’avantage porté sur l’attaque et l’analyse des statistiques. La défense est ainsi, à mon niveau, mit en second plan. Personnellement, en France, j’ai toujours construit mon équipe autour de la défense car je pense qu’elle est plus importante que l’attaque. C’est un élément qui m’a bousculé en début d’année.

De plus, le système américain est fait pour que les sportifs réussissent. Tout est mis en place pour que les athlètes se concentrent uniquement sur leurs performances. Par exemple, il y a de nombreuses infrastructures sur le campus, à l’image de gymnase, de salle de musculation, ou encore de soins médicaux à disposition. Les coachs ont un bureau au sein même du campus pour se rendre disponible à tout moment de la journée afin de venir en aide aux joueuses.

Il y a énormément d’argent qui est investit dans le sport universitaire, notamment via les bourses. Les joueuses ont droit à des bourses, partielles ou complètes, selon les universités qui leur permettent de payer le logement, leur nourriture, les cours etc. Un élément qui influe sur la venue des joueuses dans les universités. Ainsi, les universités qui détiennent des bourses complètes vont plus facilement attirer les meilleures joueuses de l’État. Dans notre établissement, nous proposons seulement des bourses partielles. De l’argent est aussi investit dans les déplacements, avec l’achat de mini-bus, essentiel pour se déplacer dans un grand État tel que le Texas (entre 3 à 6 heures de route selon les équipes), mais aussi dans les réservations d’hôtels, car la plupart du temps, nous dormons la veille du match dans la ville où l’on joue.

Le basket, pour eux, c’est comme une religion.

– Comment s’organise le championnat américain à votre niveau ?

Nous sommes en Junior Collège. Ce sont des universités de deux ans, que l’on réalise juste après le lycée. Nous évoluons au sein de la NJCAA, dans la division 1. Le but de nos joueuses est de montrer l’intégralité de leur talent sur ces deux ans afin de débloquer des opportunités dans de plus grandes universités américaines, à l’image de la NCAA. Il y en en tout 24 conférences aux États-Unis. L’objectif est d’obtenir le titre de champion de conférence lors du tournoi final de région. Puis, les 24 meilleures équipes ainsi que quelques équipes invitées participent au championnat national afin de déterminer la meilleure équipe du pays en NJCAA.

– Quels sont les résultats actuels de l’équipe ?

Aux États-Unis, il différencie le bilan de l’ensemble des matchs, et des matchs uniquement de conférence. Pour accéder au tournoi régional, seulement le bilan des matchs de conférence est prit en compte. Le bilan total est utilisé lorsque deux équipes sont ex-æquo à la fin de la saison.

A l’heure actuelle, nous sommes à deux victoire pour dix défaites, pour un bilan de deux défaites sur deux rencontres concernant les matchs de conférences. L’objectif est d’atteindre le Top 8 pour accrocher le tournoi de région en fin d’année. Mais aussi de battre le record de l’année précédente, auquel les américains sont très attachés. Battre ce record chaque année est un objectif important pour eux. La saison dernière, ce dernier était de 5 victoires sur l’année. Le but sera donc de faire au moins 6 ou 7 victoires cette saison.

– Quel(s) enseignement(s) pourriez-vous retenir de ces premiers mois ?

Selon moi, c’était indispensable de sortir de sa zone de confort pour grandir. Cette expérience est bénéfique pour ma vie, à tous les niveaux. Même s’il y a des moments difficiles comme le fait d’être loin de sa famille, je ne regrette pas ce voyage. J’ai découvert de nouvelles approches dans le basket, j’ai pu obtenir des responsabilités et y faire face tout au long de cette première partie de saison.